Départs de salariés : comment s'adresser à ceux qui restent ?

Rédigé le 24/11/2022


La tentation pourrait être grande de continuer à faire comme si rien ne s'était passé. Mais l'entreprise doit, au contraire, accuser réception d'une nouvelle réalité.

Démissions, ruptures conventionnelles, licenciements… Les séparations professionnelles se multiplient. Mettons-nous, durant quelques minutes, dans la peau de salariés chanceux - parce que non brutalement congédiés - de Twitter ou de Meta, l'ex-Facebook qui va se séparer de 11.000 salariés sur 87.000 dans le monde. Ou bien dans celle de tout collaborateur qui voit partir, de leur plein gré, nombre de collègues enthousiastes en quête d'un nouvel équilibre de vie. Ils perdent des amis ou de simples connaissances dont la décision de s'en aller provoque une certaine confusion dans leur esprit. Selon une étude sur l'impact des départs de collaborateurs au sein d'une entreprise, réalisée par poll & roll auprès d'un panel de 1.000 professionnels français pour la start-up RH HeyTeam, près d'un sondé sur trois confie qu'un départ a affecté sa vie personnelle. Pis, 31 % parlent même d'un impact sur leur santé mentale et physique. Au total, ce sont plus de sept salariés sur dix (74 %) qui ont vu au moins un collaborateur quitter leur équipe durant les douze derniers mois. Des départs - à 67 % volontaires et à 18 % subis - qui auraient altéré les liens avec leur entreprise de 43 % des salariés restants. Comment les entreprises doivent-elles réagir en pareilles situations ? « Il leur faut tenir un discours de remobilisation, authentique et factuel », conseille Frédéric Fougerat, président fondateur de Tenkan Paris.

Ne pas enjoliver

Accuser réception d'une nouvelle réalité : des démissions successives, le départ de personnes clés, des licenciements… Et surtout écouter, d'autant que 58 % des sondés souhaitent qu'en ces circonstances la communication en entreprise s'améliore.

« L'erreur la plus stupide serait de détourner le regard ou de chercher à enjoliver les choses », poursuit l'ex-dircom d'Altran, Elior et Foncia. Les dirigeants doivent, au contraire, ne pas esquiver les questions ​​et surtout donner des perspectives. L'objectif est de préserver l'engagement des salariés encore en poste. D'autant plus que des études démontrent, qu'en de telles circonstances, la productivité de ceux qui restent tend à diminuer. C'est donc le moment de se concentrer sur les gens et de leur témoigner de la considération.

L'image employeur est en jeu

Décalage de perception toutefois pointé par l'étude : quand seulement 53 % des salariés jugent que l'entreprise gère bien les départs de collaborateurs, 81 % des managers s'estiment suffisamment formés pour accompagner leurs équipes. Pour contrer les effets potentiellement délétères des départs (même amiables, les séparations provoquent des dysfonctionnements internes), 32 % des sondés suggèrent que l'on améliore la passation et le transfert de compétences et 27 % la communication après chaque départ.

Bien sûr, les salariés qui restent « vont devoir assumer les tâches réalisées par ceux qui quittent leur poste », rappelle le docteur en psychologie Emeric Lebreton, dans son très sérieux ouvrage « Et puis M*** c'est fini » (Editions Orientaction) ; ce que corroborent 56% des sondés qui ont vu leur charge de travail alourdie. Prévoir ​un accompagnement collectif pour réorganiser l'équipe s'impose.Les dirigeants et managers vont aussi devoir travailler à un nouveau récit. « Il importe d'utiliser les points forts de l'entreprise pour la repositionner dans l'actualité sans occulter ses points faibles et les marges de progression envisagées », conseille Frédéric Fougerat. En pleine déstabilisation économique et géopolitique, il est capital d'éviter tout décalage entre discours et pratiques professionnelles. Il en va de l'image employeur de l'entreprise.

À noter

Le sentiment d'appartenance des collaborateurs profite désormais plus à leur équipe (83 %) qu'à l'entreprise (78 %), selon une étude OpinionWay pour l'Observatoire de l'engagement, qui relève aussi que 8 actifs sur 10 trouvent les salariés plus individualistes qu'auparavant.

Source : Les Echos