Projets budgétaires 2026 : un déluge d’austérité menaçant les travailleurs

Rédigé le 29/10/2025


Des mesures austères qui visent une fois de plus, et de plus en plus durement, les travailleurs, les assurés sociaux et les services publics. Telle est la philosophie des projets de textes budgétaires pour 2026, dévoilés le 14 octobre par le deuxième gouvernement de Sébastien Lecornu, et désormais soumis au Parlement. Les mesures du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale ont pour beaucoup un goût de déjà-vu, inscrites en effet dès l’été dernier dans le plan d’économies présenté par l’ex-Premier ministre, François Bayrou. Ainsi en est-il du gel des prestations sociales, des pensions, du barème de l’impôt sur le revenu ou encore des salaires indiciaires des agents publics. Ainsi en est-il aussi des dispositions abaissant les droits en matière de santé, des projets fiscaux impactant les retraités ou encore des suppressions d’emplois projetées dans le public. Les textes présentés cet automne portent aussi le sceau de l’actuel gouvernement. Parmi les mesures projetées, celle imposant aux hôpitaux une austérité encore plus marquée que les dix années précédentes, cela via un objectif national de dépenses (Ondam) fixé à 1,6 %. Tour d’horizon, en cinq étapes, de mesures bien loin de mettre en œuvre une justice sociale et fiscale qu’avec les travailleurs FO ne cesse de revendiquer.

 

Hôpitaux : malades d’un Ondam toujours plus insuffisant

Tombola, appels aux dons par des enfants, emprunt citoyen… L’hôpital public mérite mieux que la charité !, s’indignait, le 15 octobre, la branche santé de la SPS-FO au lendemain de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. De la solidarité à la charité, nous assistons à un retour en arrière inacceptable et sans précédent, fulminait la fédération FO. Et de citer les hôpitaux de Saint-Nazaire, Évreux, Nantes et Georges Pompidou à Paris, sites où l’appel au public a été activé pour ouvrir des lits, payer un scanner ou encore pour fournir du matériel aux équipes soignantes, et pour des projets de recherche qui sauvent des vies. Ces pratiques, que conteste FO, se sont développées à la faveur d’une situation hospitalière plus que dégradée et qui ne doit rien au hasard. Depuis des années FO dénonce ainsi un Objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Ondam) qui étrangle financièrement les établissements de santé. Avec pour conséquences des  fermetures de lits, des restructurations, privatisations, mutualisations, externalisations et suppressions de postes. En vingt-cinq ans, 100 000 lits ont été fermés dans les hôpitaux.

Un budget dramatiquement en dessous des besoins réels

Cette pénurie de moyens risque de perdurer en 2026. L’Ondam (créé en 1996 par le gouvernement Juppé) prévu par le PLFSS serait ainsi de 1,6 % (soit une économie de 7,1 milliards d’euros sur la santé) avec un sous-Ondam hospitalier affiché à 2,4 %. Les économies infligées aux hôpitaux seraient de 1,8 milliard d’euros. Selon les professionnels de santé, l’évolution des dépenses hospitalières, en tenant compte de divers paramètres, serait plutôt de 2,1 % (111,8 milliards d’euros contre 109,6 en 2025). Et même plus rude. En intégrant le paiement à la CNRACL de la hausse du taux de cotisation employeurs (en vigueur depuis cette année), cet Ondam hospitalier serait en réalité de 1,6 %, s’alarment entre autres les fédérations hospitalières, notant que c’est le taux le plus bas depuis une dizaine d’années, hors période Covid. Et de s’indigner : Il manque 1,1 milliard d’euros, ce qui correspond à 20 000 postes d’infirmiers. Pour la SPS-FO, c’est un budget de destruction, dramatiquement en dessous des besoins réels : il ne compensera même pas l’inflation et condamnera les établissements à poursuivre les restrictions, au détriment de la qualité des soins comme des conditions de travail. Pour couvrir a minima les besoins des établissements, l’Ondam hospitalier devrait être au moins de 5 %, soulignent depuis des années les acteurs de la santé. FO aussi.

Valérie Forgeront

 

Fonction publique : de plus en plus une variable d’ajustement budgétaire

Le budget Lecornu est une saignée pour la fonction publique, fulminait le 15 octobre la Fédération générale des fonctionnaires FO. Les dépenses de l’État baisseront en 2026, martèle de son côté le gouvernement. Et cela va se traduire par une baisse en valeur des crédits ministériels, dont ceux affectés au financement des opérateurs. Cet effort exemplaire requiert un pilotage resserré de la masse salariale de l’État et une maîtrise de son train de vie, une rationalisation et un recentrage des dépenses des opérateurs ainsi que de certaines aides. La mise en place de la mission État efficace contribuera également au respect de cet objectif en 2026. La FGF-FO liste les mesures austères concernant, spécifiquement ou non, les 5,7 millions d’agents publics, fonctionnaires et contractuels, et les pensionnés du public. Ainsi est décidé une une troisième année blanche. En clair, comme depuis 2024, aucune revalorisation générale des salaires indiciaires. FO ne cesse de demander cependant une hausse immédiate du point d’indice à hauteur de 10 % et une revalorisation de la grille des trois catégories (A, B et C). Cela entre autres pour contrer le phénomène de Smicardisation des salaires dans le public. Le pouvoir d’achat du point a ainsi reculé de 31,5 % en vingt-cinq ans.

Attaques tous azimuts

Les effectifs publics sont aussi impactés avec la suppression annoncée de 3 119 postes en 2026 dont 1 735 postes ETP chez les opérateurs. À l’Éducation nationale, souligne la FNEC FP-FO, si 5 400 emplois supplémentaires sont annoncés, ce n’est qu’un trompe-l’œil. Par la réforme des concours d’enseignants, les élèves fonctionnaires de master 1 ne seront pas dans les classes et les besoins en enseignants ne seront donc pas comblés. Le manque de postes se chiffre à plus de 4 000, soit pire qu’en 2025. L’austérité appliquée au public vise aussi les retraités avec un gel des pensions. Est maintenue aussi la baisse de 10 %, déjà en vigueur, de l’indemnisation des arrêts maladie de moins de trois mois. La FGF-FO note aussi la baisse de 15 % des crédits de l’action sociale interministérielle, alors que l’appauvrissement des agents est patent. Par ailleurs, la taxation des cotisations de mutuelle, à hauteur d’un milliard d’euros, risque d’avoir rapidement une répercussion sur les tarifs des contrats signés par les ministères avec les opérateurs, dans le cadre de la réforme de la protection sociale complémentaire (PSC). Illustration encore de l’austérité, la mise en place de la PSC dans l’hospitalière est repoussée à 2028.

Valérie Forgeront